Deux backpackers débarquent au Ritz-Carlton

Berlin, Allemagnelundi 20 avril 2009

Donc, petit rappel de la situation : les employeurs de Mika nous ont offert une nuit dans le plus bel hôtel de Berlin, le Ritz Carlton.

Après avoir déposé nos gros sacs à dos de baroudeurs à la gare et mis les habits les plus présentables que nous avions, nous nous rendons à l'hôtel, sur la Potsdamer Platz.

Arrivés à l'hôtel, le portier nous accueille, le dialogue était à peu près le suivant :

  • Bonjour, je peux faire quelques chose pour vous ?
  • Oui, nous venons pour un check-in
  • Ah ! (petit moment de blanc). Voulez-vous que je demande à faire monter vos bagages ? Ils sont dans la voiture, je suppose !
  • Euh, nous n'avons pas de bagage, juste nos sacs à dos (là, on a pas osé lui dire qu'on arrivait tout droit du métro)
  • (nouveau petit blanc du portier, mais qui continue à sourire quand même) Très bien, je vous accompagne à la réception ! (située à pas plus de 2 mètres)

Là, nous sommes accueills à grands coups de "bonjour Madame, bonjour Monsieur", "vous avez fait un bon voyage ?", etc. Le checkin se fait en une poignée de secondes.

"- J'ai une très jolie chambre Deluxe à vous proposer, au huitième étage, avec vue sur la place. Cela vous convient-il ?"

Ouah : en plus, nous avons été surclassés (nous ne devions avoir qu'une chambre supérieure). En essayant de prendre le ton le plus neutre possible (on a pas réussi à jouer les blasés, c'était trop nous demander), on répond que oui, cela nous convient parfaitement.

Ouf, première étape passée. Notre badge n'est pas encore prêt, mais aucune importance, une personne nous accompagne à la chambre, et le service d'étage nous l'apportera dans quelques minutes. Nous passons dans le hall de l'hôtel, avec lustres en cristal et escaliers en marbre, dorures et tapis partout. L'air est délicatement parfumé, et on entend une petite musique de piano. Dans l'ascenseur, nous discutons un peu avec notre accompagnatrice. C'est une stagiaire hongroise, qui à déjà travaillé au Ritz à Paris, et qui parle un peu le français. Elle nous amène jusqu'à la chambre, et nous en profitons alors pour lui poser toutes les questions que nous n'avions pas osé poser à la réception, comme "Comment ça fonctionne pour le petit déjeuner ?", "la piscine, on y va comment, habillé ou en peignoir ?", "et on emmène sa serviette, ou il y en a en bas ?". La grande classe. Mais elle a compris que c'est notre "première fois", et elle nous répond le plus simplement et le plus gentiment du monde.

Nous en profitons pour lui demander une adresse de restaurant typique Allemand, pas trop cher. Elle nous donne une adresse, et elle nous indiquera comment y aller sur un plan quand on repassera à la réception.

Puis elle nous laisse, et nous partons à la découverte de la chambre.

Là c'est tout simplement hallucinant. La chambre doit faire 40-50 m², le lit au moins 2 mètres de large et 70cm de haut, avec 3 oreillers par personne. Il y a un lustre en cristal dans l'entrée (oui, il y a une entrée), un bureau dans un coin de la pièce, et un grand écran plat sur la commode en face du lit. La salle de bain est aussi très grande, intégralement en marbre, avec des lavabos en faïence.

Et la chambre fourmille de petits détails (je vais essayer de ne pas en oublier)

  • Sur une table basse, une bouteille d'eau minérale et 2 verres nous attendent (et les 2 verres sont recouverts d'un petit capuchon en plastique pour que pas une seule poussière n'y pénètre)
  • Un petit carré de chocolat Valhrona (donc un gros cran au dessus du Nestlé Dessert, pour ceux qui connaissent pas) est placé sur chaque table de chevet
  • Dans le tiroir des tables de chevet, on trouve un panneau tactile qui commande l'éclérage et la température de la pièce. Des pantoufles sont posées au pied du lit, de chaque coté.
  • Sur le bureau, on trouve un guide de shopping dans la ville, stylos, enveloppes, bloc note, carte de visite à remplir, avec pré-inscrit "descendu à l'Hotel Ritz-Carlton". Il y a aussi le menu du Spa et les instructions pour accéder à internet.
  • Dans le dressing : matériel de cirage de chaussures, brosse à reluire, parapluie, et liste des tarifs pour le service de pressing de l'hotel
  • Sur le presse-pantalon à coté : nécessaire de couture et menu des oreillers (oui, on peut choisir son oreiller parmi une dizaine différents : poil de cheval, noyaux de cerises, latex, etc.)
  • Sous la commode, on trouve un support pliable pour poser sa valise. Et il est placé au milimètre, ni trop en dessous (pour qu'on sache qu'il est là), ni trop qui dépasse (pour qu'il ne soit pas trop visible quand même).
  • Le meuble de l'entrée est doté d'un maxi-minibar : champagne, vins, alcools, jus de fruits, sodas, eau minérale, mais aussi des Snickers, Kit Kat, Pringles, bonbons Haribos... La porte du meuble contient 3 types de verres différents, suivant la boisson consommée.
  • Dans la salle de bain tout en marbre, la cabine de douche est énorme, avec une partie qui n'est pas arrosée par le jet pour qu'on puisse éventuellement y poser sa serviette.
  • La baignoire possède aussi son menu : un "Bath butler" (majordome de bain) peur venir y préparer un bain à thème : bougies, pétales de roses et champagne, ou bien bain moussant et canard en plastique, il y en a pour tous les goûts
  • Bien entendu, la salle de bain est entièrement équipée : peignoirs, 2 paires de serviettes, miroirs, miroir loupe, sèche cheveux, savon, shampooing, après shampooing et lait pour le corps Bulgari, lime à ongles, cotons tiges, mouchoirs... tout y est.

Le tout donne une impression de finition, de détail et de subtilité assez ahurissante. C'est là toute la différence entre un bel hôtel et un hôtel de grand luxe.

Alors que nous sommes à peine en train de nous remettre du choc, quelqu'un sonne à la porte (non, pas avec un driiiinnnng, avec une petite musique de carillon toute mimi). C'est le service d'étage, qui nous apporte notre carte magnétique. Il sera également la 3e ou 4e personne à nous demander si tout va bien, et si nous avons des questions.

Et 5 minutes plus tard, rebelote. Cette fois, c'est une femme de chambre qui vient faire le lit. En même pas 3 minutes, elle a défait le dessus de lit, l'a plié et rangé dans la commode, a déplié les draps, replacé les oreillers, installé la couette et déposé des pantoufles de chaque coté du lit. J'ai pourtant essayé de voir sa technique, mais elle est allée tellement vite que je n'ai rien compris. Elle nous demande si elle souhaite qu'on ferme les rideaux, mais nous déclinons (la vue de la fenêtre est trop sympa pour qu'on la cache). Et pouf, à peine arrivée, déjà repartie. La chambre est prète pour aller se coucher, on a pas levé le petit doigt. Le grand luxe, je vous dis.

C'est maintenant l'heure du cocooning : un bain et une douche, on enfile les peignoirs, et là on a vraiment l'impression d'être un miliardaire Russe ou un roi du pétrole. Mais l'heure du repas approche, et nous décidons de descendre à la réception pour récupérer l'adresse de ce fameux restaurant.

Arrivées en bas, mauvaise nouvelle : la piscine est fermée pour travaux, nous ne pourrons pas y descendre en peignoir (c'est peut être pour cela que nous avons été surclassés, d'ailleurs). Irina (c'est son nom) nous indique l'adresse du restaurant, et la façon de s'y rendre en métro. Enfin une qui a compris que la voiture et le taxi, c'est pas notre truc, mais elle y met quand même moult précautions et nous prévient que c'est assez loin (enfin, 4 stations de métro, personnellement on a vu pire) . Elle nous demande si on veut réserver, mais nous préférons jouer la prudence et voir le prix des menus avant. Elle va alors voir le concierge de l'hôtel, qui appelle le restaurant pour savoir s'il reste de la place libre. La réponse est affirmative, nous la remercions et sortons de l'hôtel pour aller au métro.

Ça, c'était sans compter sur notre ami le portier :

  • Bonsoir, où souhaitez-vous vous rendre ?
  • Euh, à ce restaurant (nous lui montrons le papier d'Irina)
  • Je ne connais pas. C'est quel type de restaurant ?
  • Euh, un restaurant allemenand typique
  • Euh... très bien. Je vous apelle un taxi. (et là, il va faire un pas en direction de la file de taxis qui attend devant l'hôtel, prêts à sauter sur les plus gros portefeuilles de Berlin)
  • (Nous l'arrêtons au vol, et lui répondons le plus naturellement du monde ce qui nous paraît être une évidence, à nous autres prolétaires) Euh non, merci, on va prendre le métro, c'est pas loin, à 4 stations d'ici !

On sent à nouveau le blanc d'une demi seconde, le sourire qui frémit un petit peu (mais qui se rétablit immédiatement). Et, sans se démonter, il nous indique la direction de la station de métro (située à même pas 30 mètres de là, et que nous connaissions déjà pour être arrivés par là 3 heures auparavant. Mais ça, on a pas osé lui dire).

Note pour plus tard : les riches ne prennent pas le métro. Il prennent un taxi, même si il y a 15 minutes de trajet. Et les riches ne connaissent pas non plus l'adresse du restaurant où ils vont. Ca, c'est le travail du portier. Et on ne lui à même pas donné de pourboire pour nous avoir indiqué la direction. On est vraiment des ploucs.

Alors que nous descendons dans les couloirs du métro, l'impression est bizarre. On se sent légers, un peu comme la plume qui tombe délicatement dans la pub Lindt "quelques grammes de finesse dans un monde de brutes". On a comme l'impression de flotter dans une dimension un peu au dessus des autres. Et en même temps, on est quand même un peu soulagés de sortir de l'hôtel et de toutes ces petits trucs auxquels nous devons faire attention, et dont nous n'avons pas l'habitude.

Bien entendu, nous trouvons le restaurant sans problème. Les prix sont légèrement plus élevés qu'a notre habitude, mais soyons fous ! (après tout, on est quand même des rois du pétrole qui descendent au Ritz Carlton et qui sentent le savon Bulgari).

Le repas est très bon (on a gardé l'adresse, pour ceux que ça intéresse), et nous rentrons à l'hotel pour la 2e partie de soirée : notre verre de champagne au "Curtain Club", le bar du Ritz Carlton.

Notre gentil portier nous demande si nous avons trouvé le restaurant facilement, et si nous l'avions apprécié (et là, c'est difficile de lui répondre sans finir la phrase d'un "et toc !"). Nous remontons dans la chambre, posons nos sacs et descendons au bar.

L'ambiance y est détendue, la la lumière est tamisée, il y a des grands fauteuils et des tables basses, des rideaux et des tapis partout. La musique est agréable mais pas trop "jazzy-chic-fashion-zen". Il y a un léger souffle d'air frais, suffisant pour se tenir éveillé, mais presque imperceptible autrement. Juste ce qu'il faut. Deux hommes en costume discutent avec le barman, un couple boit un verre dans un coin. Nous nous installons, le serveur arrive aussitôt et, amène un présentoir contenant cacahuètes et énormes olive. Nous lui tendons notre voucher, et il revient avec une bouteille de champagne. Il nous sert en nous indiquant l'appellation et le millésime (qu'on a pas retenus, en tant que gros incultes du champagne).

Et là, l'effet Lindt revient, avec la plume qui tombe au ralenti et tout. Tout est parfait, on se trouve dans un espèce d'univers ou le temps ne s'écoule plus, où tout est parfait juste comme il faut, et même tellement parfait que ca n'en est même pas trop parfait. Enfin bon, après avoir relu 3 fois cette phrase, vous l'aurez compris; c'est en fait une sensation totalement indescriptible.

Nous y passons une bonne heure, à discuter de tout et de rien, puis nous décidons finalement de remonter. En repassant par le hall désert, nous décidons d'aller faire un petit tour et d'aller voir "la salle de bal", comme ils l'apellent, située en mezzanine à l'étage juste au dessus. Et là, nous redescendons très vite sur terre lorsque l'agent de sécurité arrive et nous demande gentiment mais fermement de sortir de la salle, dans un patois mi-allememand, mi-anglais, mi-rien-du-tout. Nous avons peut être été un peu loin, alors nous remontons dans notre chambre pour une bonne nuit de sommeil.

Au final, cette expérience a été tout simplement extraordianaire. Nous avons effleuré un monde totalement nouveau, à des années lumière du reste de notre voyage sac-à-dos / train couchette / sandwich / auberge de jeunesse. "Quelques grammes de finesse dans un monde de brutes", je vous dis. Nous renouvellerons sans doute l'expérience dans quelques années, et cette fois nous y serons sans doute plus préparés.

(pour la suite, et notamment pour en savoir plus sur le petit déjeuner gargantuesque du lendemain, je vous invite à lire la suite dans l'article sur Berlin)